Chez nous

Nous n'avons pas choisi d'habiter un condo mais une maison isolée, en retrait de la rue, immergée dans une coulée de verdure.

Une fois franchie la grille, on est sur l'allée d'une centaine de mètres qui conduit chez nous.

Le long mur à gauche, égayé par une profusion de fleurs appelées, je crois, oiseaux du paradis, nous sépare d'un immeuble assez vétuste de trois étages. Les fenêtres, petites alvéoles toutes identiques, sont probablement celles des cuisines. A droite, se succèdent trois maisons entourées d'un jardin assez vaste. Presqu'au bout de l'allée,à gauche, à peine visible, se trouve dans un renfoncement notre maison. Sur un des côtés, elle est longée d'un klong, qui se dissimule sous les feuillages. Là s'ébattent deux tortues dont on entend de nuit comme de jour les gros ploufs. C'est aussi le lieu de vie d' une multitude de grenouilles qui, le soir, après les forte pluies de la mousson d'été, bercent nos nuits. Sur le côté opposé, il y a deux maisons en bois où vivent les jardiniers de notre propriétaire. Derrière la maison, c'est une profusion d 'arbres et de plantes . Là se trouve une jolie bâtisse dont le toit croûle sous les volubilis: notre propriétaire y a son atelier de peinture. Comme elle aime aussi les animaux, nous sommes environnés de chats et de pépiements d'oiseaux.

Ce cadre bucolique et enchanteur a pour l'instant échappé au saccage méthodique de la ville. Notre rue s'appelle Suan Phlu, que l'on peut traduire par le"jardin(suan) de bétel(phlu)".  Aujourd'hui, les champs de bétel ont disparu; on peut acheter les feuilles de cet arbuste au marché. Pliées en quatre, elles servent de contenant pour le miang, un en-cas frugal mais délicieux: dans la feuille de bétel, on dépose en toutes petites quantités de minuscules dés de gingembre et de citron vert, une cacaouète, quelques filaments de noix de coco séchée, un peu de crevettes séchées et une pointe de chili. La touche finale est une sauce épaisse, un peu sucrée. On enferme le tout dans la feuille et on déguste ainsi.